LA CROIX DE CHRIST; Quelques Autres Distinctions; L'État de l'Homme par Nature; Comme en Adam, de même en Christ; Le Moyen Divin de la Délivrance; Ce que Représentent et Renferment Sa Mort et Sa Ressurection

 

CHAPITRE SECOND

LA CROIX DE CHRIST

 

Nous avons vu que les huit premiers chapitres de l'épître aux Romains se divisent en deux parties. Il nous est montré, dans la première partie, que le Sang agit à l'égard de ce que nous avons fait ; tandis que, dans la seconde, nous verrons que la Croix * agit à l'égard de ce que nous sommes. Nous avons besoin du Sang pour avoir le pardon ; nous avons besoin de la Croix pour être délivrés.

 

NOTE. - L'auteur emploie les mots « la Croix», ici comme dans toutes ces études, dans un sens particulier. La plupart des lecteurs sont habitués à l'emploi courant de l'expression « la Croix », qui exprime, premièrement, l'oeuvre rédemptrice complète accomplie histo­riquement dans la mort, l'ensevelissement, la résurrection et l'ascension du Seigneur Jésus Lui-même : « Ayant paru comme un simple homme, il s'est abaissé lui-même, se rendant obéissant jusqu'à la mort, même jusqu'à la mort de la Croix. C'est pourquoi Dieu l'a souverainement élevé et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom » (Philippiens 2, 8-9), - et deuxièmement, dans un sens plus large, l'union des croyants avec Christ en tout ce qu'il a traversé, par la grâce : « Nous avons été ensevelis avec lui par le baptême en sa mort, afin que, comme Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, de même, nous aussi, nous vivions d'une vie nouvelle » (Romains 6, 4). - « Dieu... lorsque nous étions morts par nos fautes, nous a vivifiés avec Christ - c'est par grâce que vous êtes sauvés ! - Il nous a ressuscités ensemble, il nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes en Jésus-Christ » (Ephésiens 2, 5-6). Il est clair que ce terme, l'oeuvre « du Sang » en relation avec le pardon des péchés (qui a été traité dans le premier chapitre de ce livre) est considéré, au point de vue de Dieu (ainsi que tout ce qui suivra dans ces études) comme une part de l'oeuvre entière de la Croix.

 

Dans ce chapitre-ci et dans les suivants cependant, l'auteur a dû, faute d'un autre terme, employer « la Croix » dans un sens doctrinal particulier et plus restreint, afin d'établir une distinction utile, celle qui existe entre la substitution et l'identification, qui sont, sur le plan humain, deux aspects distincts de la doctrine de la rédemption. Ainsi le mot, qui désigne l'ensemble de l'oeuvre, a été employé, par nécessité, pour désigner une de ses parties. Le lecteur aura soin de s'en souvenir dans ce qui suivra. - Ed.

Nous avons traité brièvement, dans les pages précédentes, le premier aspect de nos besoins, et nous nous arrêterons maintenant sur le second ; mais avant de le faire, nous considérerons encore quelques autres traits importants de cette section qui soulignent la différence entre les sujets traités et les raisonnements suivis dans ces deux parties.

 

Quelques Autres Distinctions

 

Deux aspects de la résurrection sont mentionnés dans les chapitres 4 et 6. Dans Romains 4, 25, la résurrection du Seigneur Jésus est liée à notre justification : « Jésus, notre Seigneur, a été livré pour nos offenses et ressuscité pour notre justification ». L'objet qui est en vue dans ce passage est notre position devant Dieu. Mais, dans Romains 6, 4 la résurrection nous est montrée comme nous donnant une vie nouvelle en vue d'une marche sainte : « Afin que, comme Christ est ressuscité... de même, nous aussi, nous marchions en nouveauté de vie ». La question qui est ici devant nous est celle de notre marche avec Dieu.

 

D'autre part, il est parlé de la paix dans les chapitres 5 et 8. Romains 5 parle de la paix avec Dieu, qui est le fruit de la justification par la foi en Son Sang: « Etant donc justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus-Christ » (Romains 5, 1). Cela signifie que, puisque j'ai reçu le pardon de mes péchés, Dieu ne sera plus pour moi un objet de terreur et d'angoisse. Moi qui avais été un ennemi de Dieu, j'ai été « réconcilié avec lui par la mort de son Fils » (Romains 5, 10). Cependant, je m'aperçois bientôt que je suis pour moi-même un grand sujet de tourment. Il y a encore de l'inquiétude en moi, car il y a, tout au fond de moi, quelque chose qui me pousse à pécher. J'ai la paix avec Dieu, mais je n'ai pas la paix avec moi-même. Il y a en fait la guerre civile dans mon propre coeur. Cet état de choses est bien dépeint dans Romains 7, où la chair et l'esprit sont vus se livrant un conflit mortel, en moi. Mais à partir de là, l'exposé nous conduit, dans le chapitre 8, à la paix intérieure d'une marche selon l'Esprit. « Les sentiments que fait naître la chair produisent la mort »... parce qu'ils sont « inimitié contre Dieu ; mais les sentiments que fait naître l'esprit produisent la vie et la paix » (Romains 8, 6-7).

 

En poursuivant notre recherche, nous voyons que la première moitié de la section traite, de manière générale, la question de la justification. Voyez, par exemple : « Ils sont justifiés gratuitement par sa grâce, au moyen de la rédemption accomplie en Jésus-Christ, que Dieu a établi comme victime expiatoire, par la foi en son sang. Il a ainsi manifesté sa justice, parce qu'il avait laissé impunis les péchés commis auparavant, au temps de sa patience ; il a, dis-je, manifesté sa justice dans le temps présent, faisant voir qu'il est juste et qu'il justifie celui qui croit en jésus » (Romains 3, 24-26). Et encore : « Pour celui qui ne fait point d'oeuvre, mais qui croit en celui qui justifie l'impie, sa foi lui est imputée à justice. Pour nous aussi, qui croyons en Celui qui a ressuscité d'entre les morts jésus, notre Seigneur, qui a été livré pour nos offenses et qui est ressus­cité pour notre justification » (Romains 4, 5 et 25). Tandis que la seconde moitié de la section traite, comme sujet principal, la question correspondante de la sanctification. Voyez Romains 6, 19 et 22 : « Ainsi, de même que vous avez mis vos membres au service de l'impureté et de l'ini­quité, pour commettre l'iniquité, de même, maintenant, mettez vos membres au service de la justice, pour votre sanctification... Affranchis du péché et devenus les esclaves de Dieu, vous avez pour fruit la sanctification et pour fin la vie éternelle ». Lorsque nous connaissons la précieuse vérité de la justification par la foi, nous ne connaissons cependant que la moitié de la question. Nous avons seule­ment résolu le problème de notre position devant Dieu. A mesure que nous avançons, Dieu a quelque chose de plus à nous offrir, c'est-à-dire la solution du problème de notre conduite. Le développement de la pensée dans ces chapitres des Romains souligne l'importance de ce point. Dans chaque cas, le second pas résulte du premier, et si nous nous sommes arrêtés au premier, nous avons encore une vie chré­tienne sous-normale. Comment donc pouvons-nous vivre une vie chrétienne normale ? Comment y entrons-nous ? Il nous faut naturellement commencer par réaliser le pardon des péchés ; il nous faut connaître la justification ; il nous faut avoir la paix avec Dieu : cela constitue notre fondement indispensable. Mais ce fondement étant bien établi par notre premier acte de foi en Christ, il est clair, comme nous venons de le montrer, qu'il nous faut avancer vers quelque chose de plus profond.

 

Nous voyons ainsi que le Sang règle la question de nos péchés. Le Seigneur Jésus les a portés à notre place sur la Croix, comme notre Substitut, et Il a obtenu pour nous le pardon, la justification et la réconciliation. Mais- il nous faut faire maintenant un pas de plus dans le plan de Dieu, pour comprendre comment Il traite le principe du péché qui est en nous: Le Sang peut me laver de mes péchés, mais il ne peut me laver de mon « vieil homme ». Il faut la Croix pour me crucifier, moi. Le Sang met de côté les péchés, mais il faut la Croix pour mettre de côté le pécheur.

 

L'on ne rencontrera que rarement le mot « pécheur » dans les quatre premiers chapitres des Romains. C'est parce que ce n'est pas le pécheur qui y est principalement en vue, mais plutôt les péchés qu'il a commis. Le mot « pécheur » paraît pour la première fois au chapitre 5 seulement, et il est important de remarquer comment il y est introduit. Il est dit dans ce chapitre que le pécheur est un pécheur parce qu'il est né pécheur, et non parce qu'il a commis des péchés. La différence est importante. Il est vrai que, souvent, pour convaincre l'homme de la rue qu'il est un pécheur, le serviteur de Dieu se sert du passage bien connu de Romains 3, 23, où il est dit que « tous ont péché », mais cet emploi de ce verset n'est pas justifié par les Écritures. Ceux qui l'utilisent ainsi courent le danger d'arriver à une fausse conclusion. En effet, l'épître aux Romains n'enseigne pas que nous sommes pécheurs, parce que nous commettons des péchés, mais que nous péchons parce que nous sommes pécheurs. Nous sommes pécheurs par nature, plutôt que par action. Comme le déclare Romains 5, 19 : « Par la désobéis­sance d'un seul homme, tous les autres ont été rendus pécheurs ».

 

Comment sommes-nous devenus pécheurs ? Par la désobéissance d'Adam. Nous ne devenons pas pécheurs par ce que nous avons fait, mais à cause de ce qu'Adam a fait et de ce qu'il est devenu. Je parle l'anglais, mais cela ne fait pas de moi un Anglais. Je suis en réalité un Chinois. Ainsi, le chapitre 3 attire notre attention sur ce que nous avons fait - « Tous ont péché » - mais ce n'est pas parce que nous avons péché que nous sommes devenus des pécheurs.

 

Je posais un jour cette question dans une classe d'enfants, - « Qui est un pécheur ? » et leur réponse immédiate fut, - « Celui qui pèche ». Oui, celui qui pèche est un pécheur, mais le fait qu'il pèche est simplement la preuve qu'il est déjà un pécheur ; ce n'en est pas la cause. Celui qui pèche est un pécheur, mais il est également vrai que celui qui ne pèche pas, s'il est de la race d'Adam, est également un pécheur, et qu'il a besoin de rédemption. Est-ce que vous me suivez ? Il y a de mauvais pécheurs, et il y en a de bons ; il y a des pécheurs qui ont un sens moral, et il y en a qui sont corrompus, mais tous, ils sont également pécheurs. Nous pensons quelquefois que, si nous n'avions pas fait certaines choses, tout serait bien ; mais le mal est beaucoup plus profond : il est dans ce que nous sommes. Un Chinois peut être né en Amérique et incapable de dire un mot de chinois, mais il n'en reste pas moins un Chinois, par le fait qu'il est né Chinois. C'est la naissance qui compte. C'est ainsi que je suis un pécheur, parce que je suis né en Adam. Ce n'est pas une question de conduite, mais d'hérédité, d'ascendance. Je ne suis pas un pécheur parce que je pèche, mais je pèche parce que je descends d'une souche mauvaise. Je pèche parce que je suis un pécheur.

 

Nous sommes enclins à penser que ce que nous avons fait est très mal, mais que, en nous-mêmes, nous ne sommes pas si mauvais. Dieu prend la peine de nous faire comprendre que, nous-mêmes, nous sommes mauvais, foncièrement mauvais. La racine du mal est le pécheur ; c'est lui qui doit être mis de côté. Nos péchés sont mis de côté par le Sang, mais quant à nous-mêmes, nous sommes mis de côté par la Croix. Le Sang nous assure le pardon pour ce que nous avons fait ; la Croix nous assure la délivrance de ce que nous sommes.

 

L'État de l'Homme par Nature

 

Nous en arrivons ainsi à Romains 5, 12, 21 : « C'est pourquoi, comme, par un seul homme le péché est entré dans le monde et par le péché la mort, - et qu'ainsi la mort s'est étendue sur tous les hommes, parce que tous ont péché... En effet, avant la loi, le péché était dans le monde ; mais le péché n'est pas imputé quand il n'y a point de loi. Cependant, la mort a régné, depuis Adam jusqu'à Moïse, même sur ceux qui n'avaient pas péché par une transgres­sion semblable à celle d'Adam, lequel est l'image de Celui qui devait venir. Mais il n'en est pas de la grâce donnée comme de la faute. Car si, par la faute d'un seul, tous les autres sont morts, combien plus la grâce de Dieu et le don qu'il nous a fait, dans sa grâce, par un seul homme, Jésus­Christ - ont-ils abondé pour tous les autres! Et il n'en est pas de ce don comme des conséquences du péché d'un seul : la faute d'un seul a entraîné un jugement de condam­nation, mais le don de la grâce, venant après un grand nombre de fautes, a entraîné une justification. En effet, si, par la faute d'un seul, et du fait de ce seul, la mort a régné, combien plus ceux qui reçoivent dans toute leur abondance la grâce et le don de la justice, régneront-ils par un seul, Jésus-Christ. Ainsi donc, de même que, par une seule faute, la condamnation s'étend à tous les hommes, de même, par un seul acte de justice, la justification qui donne la vie s'étend aussi à tous. Car, de même que, par la désobéis­sance d'un seul homme, tous les autres ont été rendus pécheurs, ainsi, par l'obéissance d'un seul, tous les autres seront rendus justes. Or la loi est intervenue afin que la faute abondât ; mais, là où le péché a abondé, la grâce a surabondé, afin que, comme le péché a régné en donnant la mort, ainsi la grâce régnât par la justice, pour donner la vie éternelle par Jésus-Christ, notre Seigneur.

 

Dans ce grand passage, la grâce est mise en opposition avec le péché, et l'obéissance de Christ avec la désobéissance d'Adam. Ce passage est placé au commencement de la seconde partie des Romains (5, 12 à 8, 39), qui nous retien­dra maintenant plus particulièrement, et le sujet qui y est traité conduit à une conclusion qui sera la base de toutes les méditations qui suivront. Quelle est cette conclusion ? Elle se trouve au verset 19, déjà cité : « Car, de même que, par la désobéissance d'un seul homme, tous les autres ont été rendus pécheurs, ainsi, par l'obéissance d'un seul, tous les autres seront rendus justes ». L'Esprit de Dieu cherche ici à nous montrer, d'abord, ce que nous sommes, et ensuite, comment nous sommes devenus ce que nous sommes.

 

Au début de notre vie chrétienne, nous sommes pré­occupés par nos actes, plutôt que par notre nature ; nous sommes attristés par ce que nous avons commis, plutôt que par ce que nous sommes. Nous nous imaginons que, si seulement nous pouvions réparer certaines fautes, nous serions de bons chrétiens, et nous nous efforçons de changer notre manière d'agir. Mais le résultat n'est pas ce que nous avions espéré. Nous découvrons, avec découragement, que le trouble ne provient pas seulement de difficultés exté­rieures. Il y a en fait une cause plus grave à l'intérieur. Nous essayons d'être agréables au Seigneur, mais nous trou­vons en nous quelque chose qui ne désire pas Lui plaire.

Nous essayons d'être humbles, mais il y a quelque chose dans notre nature même qui refuse d'être humble. Nous essayons d'aimer, mais nous ne sentons aucun amour en nous. Nous sourions, et essayons de paraître aimables, mais intérieurement, nous nous sentons loin d'être aimables. Plus nous essayons de corriger notre attitude extérieure, plus nous réalisons combien profondes sont en nous les racines du mal. Alors, nous venons au Seigneur, et Lui disons sim­plement, - « Seigneur, je le vois maintenant ! Ce n'est pas seulement ce que j'ai fait qui est mal ; c'est moi qui suis mauvais ».

 

La conclusion de Romains 5, 19 commence à illuminer notre coeur. Nous sommes des pécheurs. Nous sommes membres d'une race de créatures qui, par leur constitution, sont autres que ce que Dieu avait voulu pour elles. Par la Chute, un changement fondamental s'opéra dans le carac­tère d'Adam et le fit devenir un pécheur, quelqu'un d'inca­pable, par nature, de plaire à Dieu ; et la ressemblance de famille que nous partageons tous n'est pas simplement super­ficielle, elle embrasse aussi notre nature intérieure. Nous sommes « devenus pécheurs ». Comment cela est-il arrivé ? « Par la désobéissance d'un seul », dit Paul. Permettez-moi d'illustrer ces pensées.

 

Mon nom est Nee. C'est un nom chinois assez courant. Comment l'ai-je reçu? Je ne l'ai pas choisi. Je n'ai pas parcouru la liste des noms chinois possibles pour retenir celui-ci. Le fait que mon nom soit Nee ne dépend pas de moi et, de plus, je ne puis rien faire pour le changer. Je suis un Nee parce que mon père était un Nee, et mon père était un Nee parce que mon grand-père était un Nee. Si je me conduis comme un Nee, je suis un Nee, et si je ne me conduis pas comme un Nee, je suis encore un Nee. Si je deviens le Président de la République chinoise, je suis un Nee, ou si je deviens un mendiant, je suis toujours un Nee. Rien de ce que je fais, ou m'abstiens de faire, ne fera de moi autre chose qu'un Nee.

 

Nous sommes des pécheurs, non à cause de nous-mêmes, mais à cause d'Adam. Je suis un pécheur non parce que j'ai péché individuellement, mais parce que j'étais en Adam lorsqu'il a péché. C'est parce que, par ma naissance, je descends d'Adam, que je suis une partie de lui. Et bien plus, je ne puis rien faire pour changer cela. Je ne puis pas, en améliorant ma conduite, faire de moi-même autre chose qu'une partie d'Adam, donc d'un pécheur.

 

Un jour, en Chine, je parlais dans ce sens et fis cette remarque, « Nous avons tous péché en Adam ». Un homme me répondit, - « Je ne comprends pas ». J'essayai donc de lui expliquer de la manière suivante : « Tous les Chinois font remonter leur origine à Huang-ti. Il y a plus de quatre mille ans, il fut en guerre avec Si-iu. Son ennemi était très fort, mais néanmoins Huang-ti le vainquit et le tua. Après cela, Huang-ti fonda la nation chinoise. Il y a donc quatre mille ans que notre nation a 'été fondée par Huang-ti. Maintenant, que serait-il arrivé si Huang-ti n'avait pas tué son ennemi, et qu'il ait été tué lui-même ? Où seriez-vous aujourd'hui ? » - « Je n'existerais pas du tout », répondit-il. « Oh ! non ! Huang-ti pouvait mourir de sa mort, mais vous pouvez vivre de votre vie. » - « Impossible ! » s'écria-t-il, « s'il était mort, je n'aurais pu vivre, car c'est de lui que j'ai tiré ma vie ».

 

Voyons-nous l'unité de la vie humaine ? Notre vie vient d'Adam. Si votre grand-père était mort à l'âge de trois ans, où seriez-vous ? Vous seriez mort en lui ! Votre expérience est liée à la sienne. Or, c'est exactement de la même manière que l'expérience de chacun d'entre nous est liée à celle d'Adam. Personne ne peut dire, - « Je n'ai pas été en Eden », - car virtuellement nous étions tous là, lorsque Adam céda aux paroles du serpent. Nous sommes donc tous impliqués dans le péché d'Adam, et par notre naissance « en Adam », nous recevons de lui tout ce qu'il est devenu par suite de son péché - c'est-à-dire la nature d'Adam, qui est la nature d'un pécheur. Nous tirons de lui notre existence, et parce que sa vie est devenue une vie de péché, une nature pécheresse, la nature que nous tenons de lui est aussi pécheresse. Ainsi, comme nous l'avons dit, le mal est dans -notre hérédité, et non pas seulement dans notre conduite. A moins de pouvoir changer notre naissance, il n'y a pas de délivrance pour nous.

 

Mais c'est précisément dans cette direction que nous trouverons la solution de notre problème, car c'est exacte­ment ainsi que Dieu l'a résolu.

 

Comme en Adam, de Même en Christ

 

Dans Romains, 5, 12-21, il ne nous est pas parlé seu­lement d'Adam ; il nous est dit aussi quelque chose du Seigneur Jésus : « De même que, par la désobéissance d'un seul homme, tous les autres ont été rendus pécheurs, ainsi par l'obéissance d'un seul, tous les autres seront rendus - justes. » En Adam, nous recevons tout ce qui est d'Adam ; en Christ, nous recevons tout ce qui est de Christ.

 

Les expressions « en Adam » et « en Christ » sont trop insuffisamment comprises par les chrétiens et, au risque de me répéter, j'aimerais encore souligner, par une illustration, la signification héréditaire et raciale du terme « en Christ ». L'illustration se trouve dans la lettre aux Hébreux. Nous souvenons-nous que, dans la première partie de cette lettre, l'auteur cherche à montrer que Melchisédec est plus grand que Lévi ? Nous nous rappelons le point à démontrer, c'est que le sacerdoce de Christ est plus grand que celui d'Aaron, qui était de la tribu de Lévi. Or, pour arriver à cela, il fallait d'abord que l'auteur prouve que le sacerdoce de Melchisédec est plus grand que le sacerdoce de Lévi, pour la simple raison que le sacerdoce de Christ est « selon l'ordre de Melchisédec ». - « Car il est notoire que notre Seigneur est issu de Juda, tribu dont Moïse n'a rien dit en ce qui touche le sacerdoce. Tout cela devient encore plus évident quand nous voyons s'élever, à la ressemblance de Melchisédec, un autre prêtre, établi non d'après la règle d'une ordonnance charnelle, mais par la puissance d'une vie impérissable. Voici, en effet, le témoignage qui lui est rendu : « Tu es prêtre pour l'éternité, selon l'ordre de Melchisédec » (Hébreux 7, 14-17). - Tandis que le sacerdoce d'Aaron était, naturellement, selon l'ordre de Lévi, si l'auteur peut nous démontrer que Melchisédec est plus grand que Lévi, il a atteint son but. C'est bien ce qu'il fait, et il le fait d'une façon remarquable.

 

Il nous dit, dans le chapitre 7 des Hébreux, que Abraham, un jour où il rentrait de la bataille des rois (Genèse 14), offrit la dîme de son butin à Melchisédec et qu'il reçut de Melchisédec une bénédiction. Puisque Abraham fit cela, c'est donc que Lévi est plus petit que Melchisédec. Pourquoi? Parce que le fait qu'Abraham offrit la dîme à Melchisédec signifie qu'Isaac « en Abraham » avait part à cette offrande ; et s'il en est ainsi, Jacob lui aussi « en Abraham » fit son offrande à Melchisédec, ce qui, à son tour, signifie que Lévi « en Abraham » participa aussi à l'offrande. Il est évident que le plus petit honore le plus grand par son offrande. « Or, sans contredit, c'est l'in f é­rieucr qui est béni par le supérieur » (Hébreux 7,7). Lévi est ainsi dans une position inférieure à celle de Melchisédec, et c'est pourquoi le sacerdoce d'Aaron est inférieur à celui du Seigneur Jésus. Il n'était pas encore question de Lévi, au moment de la bataille des rois. Et cependant, il était « dans les reins de son père (Abraham) », et, « pour ainsi dire », il offrit, lui aussi, « par Abraham ». « Et l'on peut dire que ce Lévi, qui prélève la dîme, l'a payée lui-même dans la personne d'Abraham; car il était encore dans les reins de son père lorsque Melchisédec vint au-devant du patriarche» (Hébreux 7, 9-10).

 

Or, c'est là la signification exacte de ces mots « en' Christ ». Abraham, qui est la tête de la famille de la foi, comprend en lui-même la famille tout entière. Lorsqu'il offrit la dîme à Melchisédec, la famille tout entière, en lui, l'offrit à Melchisédec. Ses descendants ne firent pas d'of­frande séparée, chacun individuellement, mais ils étaient tous en lui ; et par conséquent, en faisant son offrande, Abraham représentait en lui-même toute sa postérité.

Or, cela nous ouvre une perspective toute nouvelle. En Adam, tout avait été perdu. Par la désobéissance d'un seul homme, tous nous avons été rendus pécheurs. Par lui, le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort et, à partir de ce jour, dans toute la race, le péché a régné et conduit à la mort. Mais maintenant un rayon de lumière a paru sur la scène. Par l'obéissance d'Un Autre, nous pouvons être rendus justes. « Là où le péché a abondé, la grâce a surabondé, afin que, comme le péché a régné en donnant la mort, ainsi la grâce régnât par la justice, pour donner la vie éternelle par Jésus-Christ, notre Seigneur » (Romains 5, 19-21). Notre désespoir est en Adam ; notre espérance est en Christ.

 

Le Moyen Divin de la Délivrance

 

Dieu désire certainement que ces méditations nous amènent à la délivrance pratique du péché. Paul montre cela très clairement lorsqu'il commence le chapitre 6 de sa lettre par cette question : « Que dirons-nous donc ? Que nous devons demeurer dans le péché ? » Son être tout entier se révolte devant une telle suggestion : « Non certes ! » s'écrie-t-il. Comment un Dieu saint pourrait-Il être satisfait d'avoir des enfants impurs et enchaînés dans le péché ? Aussi, « comment vivrions-nous encore dans le péché ? » (Romains 6, 1-2). Dieu a donc certainement pourvu à un moyen puissant et efficace pour nous affranchir de la domination du péché.

 

Mais c'est ici qu'est notre problème. Nous sommes nés pécheurs ; comment pouvons-nous sortir de cette hérédité pécheresse ? Puisque nous sommes nés en Adam, comment pouvons-nous sortir d'Adam ? Laissez-moi le dire aussitôt, le Sang ne peut pas nous faire sortir d'Adam. Il ne reste qu'un seul moyen. Puisque nous sommes entrés dans la lignée d'Adam par la naissance, nous ne pouvons en sortir que par la mort. Pour mettre fin à notre nature de péché, il faut mettre fin à cette vie reçue d'Adam. L'esclavage du péché est venu par la naissance ; la délivrance du péché vient par la mort - et c'est précisément le moyen de déli­vrance auquel Dieu a pourvu. La mort est le secret de l'affranchissement. « Nous... sommes morts au péché » (Romains 6, 2).

 

Mais comment pouvons-nous mourir ? Plusieurs d'entre nous avons fait peut-être de très gros efforts pour nous débarrasser de cette vie de péché, mais nous l'avons trouvée des plus tenaces. Quelle est la solution ? Nous ne pourrons pas, par nos propres efforts, faire mourir notre vieille nature, mais nous avons à reconnaître que Dieu a résolu notre pro­blème en Christ. Cela est résumé dans la déclaration sui­vante de l'apôtre : « Nous tous qui avons été baptisés en Jésus-Christ, nous avons été baptisés en sa mort » (Romains 6, 3).

 

Mais si Dieu a pourvu à notre mort « en Jésus-Christ », il faut que nous soyons en Lui pour que cela devienne efficace, et cela semble être un problème tout aussi grand. Comment devons-nous « entrer » en Christ ? Ici encore, Dieu vient à notre secours. Nous n'avons, en fait, aucun moyen d'entrer, mais ce qui est plus important, c'est que nous n'avons pas besoin d'essayer d'entrer, car nous sommes en Christ. Ce que nous ne pouvions pas faire par nos propres forces, Dieu l'a fait pour nous. Il nous a mis en Christ. Laissez-moi vous rappeler 1 Corinthiens 1, 30. Je crois que c'est l'un des plus précieux versets de tout le Nouveau Testament : «Vous êtes dans le Christ». Comment? « Vous êtes par lui (c'est-à-dire « par Dieu ») dans le Christ ». Loué soit Dieu ! Il ne nous a pas laissé le soin d'imaginer un moyen d'entrer en Christ, ni de le mettre en oeuvre. Nous n'avons pas besoin de faire un plan pour

entrer. Dieu l'a fait ; et non seulement, Il l'a fait, mais Il l'a aussi accompli. « Vous êtes par lui dans le Christ Jésus ». Nous sommes en Lui ; nous n'avons donc pas besoin d'es­sayer d'entrer. C'est un acte divin, et il est accompli.

 

Maintenant, si cela est vrai, certaines choses en décou­lent. Dans l'illustration tirée des Hébreux, que nous avons considérée plus haut, nous avons vu que, « en Abraham », tout Israël - et par conséquent Lévi qui n'était pas encore né, - a payé la dîme à Melchisédec. Les descendants d'Abraham n'ont pas offert la dîme séparément et indivi­duellement, mais ils étaient en Abraham lorsqu'il l'offrit, et toute sa postérité prit ainsi part à son offrande. Nous avons là une vraie image de notre position « en Christ ». Lorsque le Seigneur Jésus était sur la Croix, nous tous, nous sommes morts - non pas individuellement, puisque nous n'étions pas encore nés - mais nous sommes morts en Lui, parce que nous étions en Lui. « Si un seul est mort pour tous, tous sont donc morts » (1 Corinthiens 5, 14). Lorsqu'Il a été crucifié, tous nous avons été crucifiés.

 

Bien souvent, lorsque nous prêchons dans les villages de Chine, il nous faut employer des illustrations très sim­ples pour expliquer les vérités divines profondes. Je me souviens qu'un jour je pris un petit livre et y glissai un morceau de papier, et je dis à ces gens qui étaient très simples : « Maintenant, faites bien attention. Je prends un morceau de papier. Il a son identité à lui, entièrement indépendante de ce livre. Comme je ne sais qu'en faire pour le moment, je le mets dans le livre. Or, je vais faire quelque chose avec ce livre. Je l'envoie à Shanghai. Ce n'est pas le papier que j'envoie, mais le papier a été mis dans le livre. Qu'arrivera-t-il au papier ? Le livre peut-il aller à Shanghaï, alors que le papier resterait ici ? Le papier peut-il avoir un sort différent de celui du livre ? Non ! Où ira le livre, le papier ira aussi. Si je laisse tomber le livre dans la rivière, le papier y tombera également, et si je l'en retire prompte­ment, je sauverai aussi le papier. Tout ce qui arrive au livre, arrivera aussi au papier, car il est dans le livre ».

 

« Vous êtes par lui dans le Christ Jésus ». L'Eternel, Dieu Lui-même, nous a mis en Christ, et ce qu'il a fait à Christ, Il l'a fait à la race tout entière. Notre destinée est liée à la Sienne. Ce qu'Il a traversé, nous l'avons traversé, car_ être « en Christ », c'est avoir été identifié avec Lui, et dans Sa mort et dans Sa résurrection. Il a été crucifié alors qu'en est-il de nous ? Devons-nous demander à Dieu de nous crucifier ? Jamais ! Lorsque Christ a été crucifié, nous avons été crucifiés aussi ; Sa crucifixion est passée, la nôtre ne peut donc pas être à venir. Je vous défie de trouver un seul texte dans le Nouveau Testament, nous disant que notre crucifixion soit à venir. Toutes les références qui y sont faites emploient l'aoriste grec, le temps qui signifie « une fois pour toutes », le temps de l'éternel passé. (Voyez Romains 6,6 ; Galates 2, 20 ; et 5, 24 ; et 6, 14). Et de même que personne ne saurait se crucifier soi-même, puis­que ce serait une impossibilité physique, de même, au point de vue spirituel, Dieu ne nous demande pas de nous cru­cifier nous-mêmes. Nous avons été crucifiés quand Christ a été- crucifié, car Dieu nous avait mis en Lui. Le fait que nous sommes morts en Christ n'est pas simplement une position doctrinale, c'est une réalité éternelle.

 

Ce que Représentent et Renferment Sa Mort et Sa Résurrection

 

Le Seigneur Jésus, lorsqu'Il mourut sur la Croix, versa Son Sang ; Il donna ainsi Sa sainte vie pour expier notre péché et satisfaire la justice et la sainteté de Dieu. Cette oeuvre était l'unique prérogative du Fils de Dieu. Aucun homme ne saurait avoir part en cela. Les Ecritures ne nous ont jamais dit que nous ayons versé notre sang avec Christ. Dans Son oeuvre expiatoire, devant Dieu, II fut seul ; aucun autre ne pouvait y participer. Mais le Seigneur n'est pas mort seulement pour verser Son Sang : Il est mort comme notre Représentant. Dans Sa mort, Il nous engloba vous et moi.

 

Nous employons souvent les termes «justification » et « identification » pour décrire ces deux aspects de la mort de Christ. La plupart du temps l'emploi du mot « identi­fication » est juste. Mais l'identification signifie plutôt que la chose vient de nous : que c'est moi qui m'efforce de m'identifier avec le Seigneur. Je reconnais que le terme est vrai, mais il doit être employé plus tard. Il vaut mieux commencer par le fait que c'est le Seigneur qui m'a englobé dans Sa mort. C'est la mort du Seigneur qui me met en position de m'identifier ; ce n'est pas moi qui m'identifie pour y entrer. Ce qui importe, c'est que Dieu m'a mis en Christ. C'est quelque chose que Dieu a accompli. C'est pour cette raison que ces deux mots du Nouveau Testament - « En Christ » sont toujours si précieux à mon coeur.

 

Nous sommes tous englobés dans la mort du Seigneur Jésus. Nous sommes aussi tous englobés dans la résurrection du Seigneur Jésus. Nous nous sommes arrêtés au premier chapitre de la première épître aux Corinthiens pour établir le fait que nous sommes « en Jésus-Christ ». Nous irons maintenant à la fin de cette même lettre pour voir plus profondément ce que cela signifie. Dans 1 Corinthiens 15, 45 et 47, deux noms ou titres remarquables sont employés pour désigner le Seigneur Jésus. Il y est appelé « le dernier Adam », et également « le second homme ». Les Écritures ne parlent pas de Lui comme du second Adam, mais comme du « dernier Adam » ; elles ne parlent pas non plus de Lui comme du dernier homme, mais comme du « second homme ». Il faut souligner cette distinction, car elle ren­ferme une vérité de grande valeur.

 

En tant que dernier Adam, Christ est la somme totale de l'humanité ; en tant que second homme, Il est la Tête d'une nouvelle race. Nous trouvons donc ici une double union, - l'une est liée à Sa mort, et l'autre à Sa résurrec­tion. En premier lieu, Son union avec la race, en tant que « dernier Adam » a commencé historiquement à Bethléhem, pour se terminer à la croix et au tombeau. Par elle, Il a rassemblé en Lui-même tout ce qui était en Adam pour l'apporter au jugement et à la mort. En second lieu, notre union avec Lui, en tant que « second homme », commence à la résurrection pour se terminer dans l'éternité - ce qui signifie, pour ne jamais se terminer - car, ayant dans Sa mort mis de côté le premier homme en qui le dessein de Dieu avait été frustré, Il est ressuscité comme la Tête, le Chef, d'une nouvelle race d'hommes, en qui ce dessein sera pleinement réalisé.

 

Ainsi, lorsque le Seigneur jésus fut crucifié sur la Croix, Il fut crucifié comme le dernier Adam. Tout ce qui était Fans le premier Adam fut rassemblé et mis de côté, en Lui. Nous y étions compris. En tant que dernier Adam, Il a effacé la vieille race ; en tant que second homme, Il intro­duit la race nouvelle. C'est dans Sa résurrection qu'Il se présente comme le second Homme, et nous y sommes compris. « Car si nous sommes devenus une même plante avec lui par la conformité à sa mort, nous le serons aussi par la conformité à sa résurrection » (Romains 6, 5). Nous sommes morts en Lui, le dernier Adam ; nous vivons en Lui, le second Homme, La Croix est ainsi là puissance de Dieu, qui nous fait passer d'Adam en Christ.