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CONSTRUCTIONS THÉOLOGIQUES ET DOCTRINES EXAGÉRÉE

 

 

Parmi les croyants, il se trouve beaucoup d'exégèse (ex­plication) forcée des textes bibliques. Par là des barrières et des barricades sont souvent élevées qui présentent de grands ob­stacles pour l'Église de Jésus. Quelques-unes des déformations de textes ou de violations de textes doivent être esquissées ici.  

 

1. La sécurité éternelle est une telle notion, laquelle es discutée à l'excès au sein de la chrétienté de langue anglaise. Afin de ne pas permettre de malentendu, je veux confesser dès 1e début que je crois aussi que Jésus ne perdra aucun de ceux qui lui ont été donnés par le Père (Jean 6:39).  

 

La Eternal security (sécurité éternelle) qui souvent domine 1a pensée des chrétiens anglais et américains a des effets qui ne sont pas bons tels que la superficialité, la tiédeur, la paresse dans 1a vie de la foi. Ensuite elle conduit aussi au légalisme. Je connais un missionnaire qui a été renvoyé à la maison par le comité directeur de sa mission et a été congédié parce qu'il prit position contre l'accentuation exagérée de la sécurité éternelle. En Europe, et avant tout en Allemagne, on craint de toute façon un peu l'expression sécurité. Nous employons par contre volontiers le mot assurance.  

 

L'accentuation exagérée de la «sécurité éternelle» conduit aussi à la déformation des explications de l'Écriture. Ainsi, j'a souvent entendu dire aux États-Unis que le roi Saül n'avait pa été rejeté, quoique l'Écriture le dise sans équivoque. Moïse témoigne du fait que ceux qui ont des relations avec les morts sont en abomination à l'Éternel et seront exterminés (Deut. 18:10-12). Saül rechercha la (sorcière) femme spirite d'Endor et il fut rejeté par Dieu.  

 

Un pasteur baptiste au Canada, homme fort connu, et que je connais bien, se permit une explication grotesque de l'Écriture. Il déclara : «Judas, qui a trahi son maître, n'était pas perdu; il avait seulement perdu sa récompense et sa couronne». mais l'Écriture dit que Judas était le fils de perdition (Jean 17:12).  

 

2. Une autre spécialité anglaise est la prétention que Jésus, aux noces de Cana (Jean 2), n'a pas changé l'eau en vin mais en jus de raisin.  

 

Ici aussi un malentendu doit être repoussé. Il va de soi que nous devons agir par tous les moyens contre le mauvais usage de l'alcool. Mais cela ne signifie pas qu'en le faisant nous devons enlever son sens à la Bible. Examinons le problème qui concerne le fond dans le Nouveau Testament d'après les «textes du vin» mis à notre disposition, et ensuite philologiquement.  

 

a. Une première allusion nous parvient par la réaction de l'ordonnateur du repas (Jean 2:10). Il disait avec étonnement: Tout homme sert d'abord le bon vin, puis le moins bon après qu'on s'est enivré; toi, tu as gardé le bon vin jusqu'à maintenant». Un ordonnateur de repas ne doit-il pas savoir ce qui est du jus et ce qui est du vin? Et depuis quand peut-on s'enivrer avec du jus?  

 

D'après cette théorie du jus, Paul aurait dû dire à Timothée: «Mais fais usage d'un peu de jus, à cause de ton estomac» ( 1 Tim. 5:23).  

 

Le bon Samaritain aurait donc dû verser de l'huile et du jus sur les blessures de l'homme battu (Lue 10:34). Ce jus aurait depuis longtemps fermenté dans ce climat chaud. Quelle Infection aurait aussi provoqué l'homme prêt à secourir avec le jus versé sur les plaies.

Ce n'est pas sans raison que les pharisiens ont insulté Jésus en l'appelant un mangeur et un buveur (Matt. 11:19). Jésus n'était pas un buveur (un obscédé, un alcoololique). Un homme n'est pas un buveur pour avoir pris de temps en temps un verre de vin.  

 

b. Le gain philologique (science de la langue) est tout aussi clair. La langue grecque n'a qu'un mot pour le vin: oinos. Pour le jus elle a une liste de quatre mots: to hygron, soit extrait de fruits et aussi des corps; chymos, chylos, opos, soit jus de fruits et jus

de plantes.  

 

Maintenant, il faut aller chercher le contre-argument à la théorie du jus dans l'inspiration de la Bible. Afin de ne pas être immédiatement accusé d'hérésie, je veux dès le début confesser que je crois à l'inspiration de toute la Sainte Ecriture. La Bible est la Parole de Dieu pour moi.

 

 

Les écoles bibliques qui adhèrent à la théorie du jus, croient avec beaucoup d'autres lieux de formation théologique à l'inspiration verbale et aussi à la dictée mot à mot par le Saint­Esprit. Le problème controversé de l'inspiration personnelle et de l'inspiration verbale ne peut pas être discuté ici. Dans l'inspiration verbale on se trouve en présence de plus de six cents manuscrits (aussi bien des écrits en majuscules qu'en minuscules) et on a des difficultés parce que les différents manuscrits qui sont à la base du texte biblique contiennent des milliers de variantes. Dans l'inspiration verbale on s'aide en admettant qu'il y a un manuscrit original qui a été dicté mot à mot. Ce manuscrit n'a pas été retrouvé jusqu'à maintenant. Les représentants de la théorie du jus doivent donc expliquer pourquoi aucun des manuscrits connus n'emploient l'expression jus. Pourquoi est-ce que sous l'inspiration du Saint-Esprit aucun des quatre mots pour jus n'a été choisi mais que l'unique mot pour vin a été pris ?  

 

Toutefois, tous les arguments ne servent à rien. Ceux qui n'en veulent pas démordre en ce qui concerne le jus refusent aux autres chrétiens le profond sérieux moral. Il y a des écoles bibliques - j'en connais - qui sont si légalistes qu'elles exigent de ses élèves la confession de foi du jus. Dans ma collection se trouve la quatre-vingt-seizième leçon d'une telle école biblique, laquelle fait un devoir pour ses étudiants de croire et d'annoncer le changement de l'eau en jus. Cette contrainte a été la cause de ce qu'un jeune homme courageux ait annoncé son départ et se soit rendu dans une autre école biblique.

Dans mes nombreux voyages de conférences à travers tous les continents, on pouvait observer que les églises ayant une tradition calviniste exercent souvent une exégèse fixe ou même légaliste de l'Ecriture (Il ne faut pas négliger que le légalisme se trouvent surtout parmi les groupes à doctrines Arminiennes tels chez les Évangéliques). Les églises de tradition luthérienne sont souvent plus empreintes de l'Evangile. Des dangers se trouvent dans les deux directions. L'étroitesse conduit au légalisme et à la tyrannie. La largeur penche vers la tiédeur et la paresse.  

 

3. En aucun mouvement d'aujourd'hui il ne se trouve autant de constructions et d'exagérations que dans le mouvement des langues et dans le nouveau, mouvement charismatiques. Qu'on lise à cet égard le chapitre qui s'y rapporte dans ce livre.

Tout interprète de l'Ecriture doit s'orienter sur les passages bibliques suivants:

Deutéronome 4:2 : «Vous n'ajouterez rien à ce que je vous prescris, et vous n'en retrancherez rien».  

 

Apocalypse 22:18-19: Si quelqu'un y ajoute quelque chose, Dieu le frappera des fléaux décrits dans ce livre; et si quelqu'un retranche quelque chose des paroles du livre de cette prophétie, Dieu retranchera sa part de l'arbre de la vie...»  

 

Ne rien ajouter - ne rien retrancher) Quel théologien est si présomptueux qu'il dise que dans chaque point de l'Ecriture Sainte il se soit acquitté envers son devoir à l'égard d'un danger ou de l'autre?  

 

Dans le passage suivant il est à peine nécessaire de dire à quel camp j'appartiens. Des centaines d'expériences et d'exemples m'ont, démontré que les mouvements à l'esprit exalté du présent ne viennent du Saint-Esprit. Cela ne veut toutefois pas dire que dans son propre camp aucune faute d'interprétation ne peut se faire.  

 

Commençons avec l'extrême droite, chez les représentants du dispensationnalisme. Ils déclarent que tous les dons du Saint­Esprit ont cessé avec l'époque apostolique. On peut lire cela par exemple chez Bullinger The Foundations of dispensational truth, page 249. Là il est écrit:  

 

«Ceux qui prétendent que ces signes durent ou devraient durer... sont trompés par le grand ennemi de la Parole de Dieu ».  

 

Bullinger place la fin des miracles apostoliques à la fin des Actes des apôtres, chapitre 28. Mais ce chapitre est plus ancien que les chapitres sur le parler en langue de 1 Cor. 12-14.

Cette théologie contient beaucoup de motifs, de vérité. Mais je refuse ses exagérations.

Sur la moitié de l'aile des opposants du soi-disant «Mouvement charismatique», il y a tout autant de problèmes. Ici il y va de l'interprétation de I Cor. 13:8. Sur cet unique verset on pourrait écrire une thèse de doctorat. Il est complètement im­possible de décrire ici tout le cercle de questions de ce seul verset.  

 

Premièrement nous citons le verset:

«La charité ne périt jamais. Les prophéties prendron fin (Katargethesontai), les langues cesseront (pausontai), connaissance disparattra (katargethesetai)».  

 

Les expressions grecques ont été mises entre parenthèses parce qu'en elles des discussions de longue haleine sont rat tachées. Nous ne pouvons pas entrer dans cette discussion à caractère problématique. Il ne s'agit en somme ici que de constructions. Et elles, je les ai souvent rencontrées.

 

 

Dans deux voyages de conférences en Nouvelle Zélande, plusieurs publications contre le mouvement des langues me son tombées sous la main, comme par exemple:  

 

The Modern Tongues and Healing Movement (Carrol Stegall). Le mouvement moderne des langues. The doctrines of Tongue (W.G. Broadbent). Les doctrines des langues.

Ce qui me lie à ces auteurs, c'est le combat de résistance contre le mouvement des langues. Ce qui me repousse, c'est le système fixe de l'interprétation de l'Écriture, une méthode qui ressemble à une preuve mathématique. Quiconque veut travailler à la Bible avec la logique humaine et une démonstration de preuves es toujours en danger de pencher d'un côté.  

 

Depuis lors, la publication de Broadbent, avec un complément de Fritz Hubmer a paru en allemand. Le titre en est: Aujour­d'hui, encore parler en langues? et il a été édité par la mission de Liebenzell.  

 

3 En passant, je veux mentionner une faute fatale à la page 171. Fritz Hubmer, dont les livres sont très appréciés des églises chrétiennes, écrit ce qui suit: «Oui, même les expulsions des démons sont, selon l'Écriture, - aussi étrange que cela puisse paraître - des manifestations de forces de Satan».  

 

Avec cette phrase, Hubmer tombe sur le dos du pasteur Blumhardt, homme puissamment rempli de l'Esprit, et sur celui d'autres hommes de Dieu. Blumhardt a chassé des démons hors de Gottliebin Diffus, et cela n'était pas une manifestation de Satan mais de Dieu. J'ai relu l'affirmation de Hubmer peut-être bien une dizaine de fois et je suis déconcerté de ce que cet auteur au fondement biblique puisse écrire une telle chose.  

 

Il ne s'agit pourtant pas de cette affirmation fatale mais de l'interprétation de 1 Cor. 13: 7. Broadbent, aussi bien que Hubmer, sont d'avis que la prophétie, les langues et la connaissance ont cessé avec le rassemblement des écrits du Nouveau Testament - du canon. La formation du canon se fit, comme cela a déjà été mentionné ailleurs, aux synodes de Jamnia et de Joppé A.D. 201. mais les deux auteurs permettent aux six autres dons de l'Esprit qui sont mentionnés dans I Cor. 12:7-11, de continuer à subsister.  

 

Bullinger termine tous les, dons de l'Esprit en l'an soixante. Broadbent et Hubmer terminent l'existence de. trois dons en l'an deux cents et laissent encore les autres ouverts.

A l'extrême gauche se trouvent alors ceux qui parlent en langue et les représentants du mouvement charismatique, qui tous laissent ouverts jusqu'à ce jour tous les dons de l'Esprit. Nous avons les effets de cette théologie non scripturaire, avec ses terribles images, devant les yeux dans le monde entier.

 

 

Il ne s'agit pas ici d'une discussion des dons de l'Esprit. Nous l'avons déjà eue dans mon livre de poche intitulé:

Die Geistesgaben (Brunnenverlag, Basel)

Les dons de l'Esprit.

Charismatic gifts (Kregel, Grand Rapids, Mich.)

Les dons charismatiques.  

 

Ici, je veux seulement mettre en garde contre des constructions, aussi bonnes qu'on ait eu l'intention de les voir.  

 

1 Cor. 13: 8 est aussi interprété de différentes manières par les hommes de Dieu. Cela prouve qu'ici aussi nous ne connaissons qu'en partie.  

 

Le professeur Dr. Karl Heim, un théologien réputé de son ère et un chrétien pieux et né de nouveau, rapportait ce passage au retour du Seigneur. Et il connaissait le texte grec mieux que Broadbent et Hubmer. Il nous montra dans ses cours, parmi d'autres choses, la signification variée de la conjonction eite - eite. On peut aussi traduire ici: «même si la prophétie, les langues et la connaissance cessent, la charité continue à sub­sister». Ceci veut dire que l'époque de l'arrêt des dons est laissée ouverte.  

 

Un jeune théologien, Helge Stadelmann, m'écrivit depuis le séminaire théologique de Dallas, Etas-Unis, ce qui suit:  

 

En ce qui concerne la glossolalie (parler en langue) il me semble que le choix des mots de Paul dans I Cor. 13:8-11 est riche en éclaircissements: Propheteiai et Gnosis seront enlevés; (katargethesontai). Les deux sont désignés comme étant des morceaux (ek merous). Ces morceaux partiels (propheteia - gnosis) seront enlevés (katargethetai), si la telos vient (clairement l'accomplissement futur - pas le canon, comme on l'entend souvent en Amérique). Au milieu de cet emploi constant des mots, nous trouvons le court énoncé eite glossay pausontai. Paul emploie ici un tout autre mot (pauomai) et ne mentionne pas non plus que ce don «sera enlevé» quand la telos viendra. Est-il donc permis d'arriver à la conclusion que la glossolalie s'est arrêtée dans une certaine mesure de soi-même (forme réfléchie du verbe!) déjà avant la fin (telos) qui vient? Cette interprétation laisserait ouverte la question de savoir quand le «parler en langue» biblique s'arrêtra, puisque la Bible ne donne pas de renseignement à cet égard. Mais on constaterait pourtant une certaine tendance à la disparition de la glossolalie».  

 

Ces phrases sont libres de la crispation habituelle. Si la Bible laisse ouverte une dernière phrase, nous ne devons pas la fermer avec nos constructions. Nous devons pratiquer l'exégèse (faire sortir l'interprétation) non pas «l'inégèse» (faire entrer l'ex­plication).

Nous n'avons pas besoin de constructions subtiles pour montrer le caractère non biblique, bien des fois démoniaque du «mouvement charismatique». Il y a suffisamment de critères bibliques, spirituels, pour établir cette preuve.